Ouvrières sortant de l’usine, film bref de Jose Luis Torres Leiva, avait fait forte impression en 2006 au FID. Quelques femmes y passaient de la fabrique à la plage, en égrenant sur ce lent chemin des démarches, des grâces, des douleurs tues et des songeries. Son premier long-métrage de fiction prolonge cette manière initiale, à la fois austère et sensible. Audelà du quatuor de personnages (Ana, Veronica, Marta et Toro), au-delà de ce qu’un scénario en pointillé laisse deviner d’un récit qui fait de la solitude et de ses échappées éperdues son horizon, l’ambition du réalisateur est de laisser libre cours à une traversée. Son souhait, selon ses mots, est « d’inviter à une dérive : mentale, virtuelle, à pied, en voiture, à bord de ferry. » Matériologie plus que cosmogonie, c’est ce qu’il faut entendre résonner dans le titre. Car ce sont bien les éléments qui imposent la construction des plans, eux encore qui dictent les déplacements des travellings. Comme si les personnages et leurs actions n’étaient là que le temps de se fondre dans un paysage qui s’étend au fur et à mesure à la taille d’un pays imaginaire, celui des émotions.
Jean-Pierre Rehm