Slavov Zizek est une figure désormais fameuse du paysage intellectuel international. Psychanalyste formé auprès de Lacan, solide philosophe également, il est l’auteur de nombreux ouvrages théoriques. A leur contenu polémique s’ajoute le malin plaisir pris à conjuguer les registres de ses références culturelles. L’opéra, le cinéma de genre, la littérature pour enfants et les grands classiques philosophiques, le tout astucieusement secoué, sont à chaque reprise l’occasion de mettre à mal les évidences d’une doxa contemporaine. En écho à nombre de ses publications (notamment le recueil en français Lacrimae Rerum), mais cette fois à partir d’extraits visibles à l’écran de films célèbres (Marx Brothers, Chaplin, Hitchcock, Tarkovski, Coppola, Lynch, mais aussi Matrix, L’Exorciste, etc.), Zizek se livre à un exercice d’analyse. Archétype du professeur, présent à l’image et s’exprimant en anglais avec un accent de l’Est inimitable, il circule dans les décors sommairement reconstitués des films dont il nous cause. Le sérieux pédagogique allié à la beauté d’extraits retrouvés toujours avec surprise, voilà un rare exemple de leçon d’intelligence. Appuyée sur le principe : “Le cinéma est l’art pervers par excellence. Il ne vous donne pas ce que vous désirez – il vous dit comment désirer.”
Jean-Pierre Rehm